Courir en méditant avec Acte
TEXTE—Marie Charles Pelletier Photos—Catherine Marois
septembre 2023

L’esprit a besoin d’immobilité, et le corps, de mouvement. Et si la course méditative nous aidait à ralentir le flot de pensées qui déferlent en nous ramenant au moment présent?
C’est ce que croit profondément Chanelle Riopel, fondatrice du studio d’entrainement multidisciplinaire en ligne Acte. ‹‹Nous utilisons le mouvement pour nous imprégner de l’environnement (naturel, architectural, humain), précise-t-elle, et recourons à nos sens comme des liants entre le corps et l’esprit pour nous aider à nous ancrer.››
Un samedi du mois d’aout, après avoir profité d’une douce matinée au chalet et ingéré un — toujours opportun — bol de granola, des coureur·euse·s de différents niveaux l’ont rejointe près de l’étang Long, sur le territoire de Lanaudière. Chanelle les attendait pour une course méditative offerte dans le cadre de la programmation estivale de BESIDE Habitat.

Une fois les salutations faites, le groupe a passé l’heure et demie suivante sans souffler mot. Le ‹‹noble silence››, explique Chanelle, ne veut pas simplement dire de se taire; il évoque aussi le fait de ne pas avoir besoin de parler. Il instaure le calme en chacun·e, et lui permet de se déposer — tout en courant — pour explorer l’état méditatif.
C’est une pratique qui exige que l’intensité et la performance soient mises de côté pour mieux laisser place à la connexion au corps, aux sensations et à l’environnement. À chaque borne préalablement choisie (par exemple, à chaque kilomètre), l’attention est portée sur un ressenti donné: la respiration, les bruits qui nous entourent, ceux que nous créons en foulant le sol, le soleil sur notre peau, la transpiration, le vent.

Quand l’on met son corps en mouvement et que l’on exerce son cerveau à focaliser sur une seule chose, les sens s’aiguisent, les perceptions s’éveillent et, pendant quelques secondes — quelques minutes quand c’est une bonne journée —, l’état de pleine conscience est atteint. Que l’on soit dans la forêt ou dans une ville, seul·e ou entouré·e, on est 100% présent·e et 100% conscient·e de ce qui se passe ici, maintenant.
«Si vous arrivez à vivre ça ne serait-ce que 10 ou 15 secondes, c’est déjà un succès», fait valoir Chanelle.
Celle qui se passionne pour le mouvement du corps nous rappelle que la méditation statique n’est pas faite pour tout le monde. Et que l’on peut défricher le chemin vers la pleine conscience autrement, un pas de course à la fois.


Miniguide pour courir en méditant — en ville comme au chalet
La méditation classique — ou l’art de faire le vide tout en restant immobile — en rebute plusieurs. C’est pourquoi Chanelle Riopel prône la course méditative, qu’elle juge plus accessible. Et elle permet de délier les muscles du corps! La fondatrice du studio Acte nous propose un miniguide pour nous familiariser avec la pratique.
Observer le noble silence.
Que vous soyez seul·e ou en groupe, respirez profondément et ramenez vos pensées au moment présent, à ce qui se passe ici, maintenant. On vise un esprit tranquille et un système nerveux calme.
Choisir un point d’ancrage.
Plutôt que d’essayer de ne penser à rien (et d’angoisser lorsqu’une réflexion jaillit), dirigez votre conscience dans une direction précise: votre respiration, la symétrie du mouvement des bras et des jambes ou encore les odeurs qui vous parviennent.
En ville, concentrez-vous sur les détails de l’architecture, sur les bruits — en essayant de les isoler — ou sur les sensations (la sueur sur votre peau, le son de vos souliers sur l’asphalte, l’air plus frais dans une ruelle). Empruntez de nouveaux chemins et variez les moments de la journée pour sortir de l’automatisme et voir la lumière changer. ‹‹Il y a quelque chose de particulièrement gratifiant à atteindre la pleine conscience en ville, malgré tous les stimulus qui nous entourent››, estime Chanelle.
Trouver la bonne cadence.
La course méditative devrait être à l’opposé du record personnel. Soyez à l’écoute de votre corps, adoptez une cadence confortable et ralentissez si vous êtes essoufflé·e. Pour ceux et celles qui n’ont pas l’habitude de courir, vous déjouerez le cerveau en portant votre attention sur l’un des éléments mentionnés plus haut plutôt que sur votre inconfort physique. Pour les coureur·euse·s aguerri·e·s, laissez votre montre à la maison et explorez plutôt le mouvement à faible intensité jusqu’à l’atteinte de l’état méditatif.

Observer plutôt que juger.
La course méditative est une intention, et non un résultat. Certaines séances se passeront mieux que d’autres; il est important de ne pas développer de frustration. Si vos pensées naviguent, regardez-les passer sans vous y arrêter et revenez tranquillement vers votre point d’ancrage. Les réflexions que l’on a ne sont ni bonnes ni mauvaises; elles sont naturelles.
Changer de point d’ancrage.
Établissez des bornes approximatives, comme les kilomètres, les intersections ou les feux de circulation, pour vous concentrer sur de nouveaux éléments. En portant l’attention sur des points d’ancrage distincts, on essaie surtout de cerner le ou les sens qui nous permettent d’atteindre la pleine conscience.
Chanelle recommande de partir de soi (par exemple, en écoutant le son de sa respiration, en ressentant l’air entrer dans les narines, puis se faire expulser par la gorge) et de tranquillement rediriger son point focal vers l’extérieur (par exemple, en relevant le regard, en détaillant l’arbre plutôt que la forêt, la pierre plutôt que l’édifice). Ainsi, vous établirez d’abord une connexion avec votre corps, votre esprit, et enfin avec votre environnement.
Atteindre la pleine conscience.
Vaut mieux le répéter: le seul objectif de la course méditative est d’atteindre cet état de pleine conscience, ne serait-ce que quelques secondes. (Et ne vous inquiétez pas, vous le saurez lorsque vous y parviendrez!) Plus vous vous pratiquerez, mieux vous connaitrez le chemin vers ces moments méditatifs, et plus ils seront longs et riches.
Cet automne, venez expérimenter la course méditative dans les sentiers de BESIDE Habitat.
Acte a vu le jour en janvier 2021, après que Chanelle Riopel eut longuement mijoté l’idée de lancer un studio d’entrainement multidisciplinaire en ligne. Acte propose des collections d’entrainements préenregistrés, des programmes structurés et des ateliers avec, toujours, le même objectif: celui d’amener chaque personne à mieux connaitre son corps, pour mieux le mettre en mouvement.